En ce moment les escapades m’inspirent plus que Paris. Un peu de France, un peu d’Andorre, pas mal d’Espagne, ça te dit ? Zou, je t’embarque dans la voiture pour un nouveau road-trip aux couleurs d’hiver à travers les Pyrénées centrales, la N260 espagnole et pas mal d’improvisation en fil rouge.
Quelques jours à tuer, une transmission intégrale, des pneus 4 saisons. Le point de départ pour aller voir la neige. Après avoir habité le midi un quart de siècle, avoir largement écumé Barcelone ainsi que le Pays Basque, me manquait le milieu. Dont acte. Avec l’espoir de saisir quelques flocons de neige sur la langue.
Corniche ariégeoise
Quel bon sudiste (NDLA : par bon, comprendre de l’ouest #TeamChocolatine) ne connaît pas la N20 pour rejoindre l’Andorre, cette nationale qui serpente entre les montagnes dans la vallée de l’Ariège ? J’ai du temps à perdre, il est temps de prendre le chemin des écoliers entre Foix et Luzenac. Prendre la sortie 12 pour profiter du Pont du Diable (oups), tourner à gauche sur la D20 aka route des corniches avant d’entrer dans Bompas, puis c’est tout droit. Enfin, tout droit. Faut le dire vite vue la tronche de la route.
Puigcerdà, ou renouer avec l’animation espagnole
J’ai l’impression que, parmi les choses que les Espagnols ont mieux réalisé que les Français, il y a quelques idées d’urbanisation. Ainsi, une prolifération plus mesurée des zones commerciales en périphérie des villes donne des centre-villes moins asphyxiés. Pour le coup j’ai trouvé Puigcerdà drôlement vivante pour un bourg de moins de 10 000 âmes, en particulier en comparaison sa bien trop calme voisine française Bourg-Madame. En plus, c’était jour de marché. Et il y a un lac parfait pour y manger son sandwich.
Pas de la Case, le centre commercial à flanc de montagne
Il y a des trucs cools au Pas de la Case. On y trouve plein de merdier à moins cher qu’en France. Je n’ai entendu que du bien de l’étendu et cher domaine skiable. La vue depuis la route N22 y menant est sympathique. Et puis… C’est tout. Parce qu’il faut reconnaître que le bled en lui même, un centre commercial accroché à flanc de montagne, est plutôt moche. Même pas eu envie de prendre de photos. Après leurs emplettes, les plus valeureux iront faire leur plein au sommet du col d’Envalira – 2 408 mètres d’altitude et 40 centimes de moins au litre. Je te laisse deviner qui est le couillon qui doublait tout le monde dans la montée poudreuse avec sa Subaru. Enfin la neige.
Descente sur Andorre-la-Vieille, sentiments partagés
Mettons-nous d’accord : l’Andorre c’est mignon. Meh, une fois retirés les activités sportives et les magasins, restent des villages avec une jolie église souvent fermé et un musée qu’on a collé là on ne sait pas trop pourquoi. Allez, le musée de l’électricité a l’air cool et le village d’Ordino nous avait plu lors de la précédente visite. Bref, en m’enfonçant pour la 2e fois dans la principauté, je sais que ce dont je vais le plus profiter, c’est la neige. J’en voulais sur la langue, j’en ai bouffé. Il y a un tout de même en côté insolite à descendre sur Andorre-la-Vieille, cette capitale de 22 000 habitants nichée dans la montagne. Le soir venu, pause bière (et travail) au pub The Camdem où je découvre avec joie que Guinness ne fait pas que son célèbre picrate épais, mais aussi une bien agréable lager.
La Seu d’Urgell, Puigcerdà en mieux
Tout n’est-il déjà pas dit ? Allez, pour la forme, précisons que le bourg aurait été fondé en 1699 av. J.-C. pour le côté sérieux, et que parmi ses 12 000 résidents figure un prince pour le côté insolite. En effet, depuis la célèbre constitution du 14 mars 1993 consacrant l’entrée de l’Andorre à l’ONU, la principauté est dirigée par deux coprinces : le Président de la République française et… l’évêque d’Urgell. (NDLA : ne va jamais faire tes courses au Pas de la Case un 14 mars. Vraiment. Il y a 4 jours fériés chomés en Andorre et le 14 mars en fait partie avec le 1er janvier, le 8 septembre et le 25 décembre. Tout lecteur suspectant une mésaventure personnelle voit juste et ne gagne rien.)
Bref, fais donc une pause ici pour profiter d’un centre historique mignon, de la seule cathédrale de style roman-italienne de Catalogne, de ses revendications féministes. Ah, puis la ville s’est dotée d’une mascotte bien pipou je trouve.
N260, terre rouge et panoramas
Cette route est un régal, aussi bien pour piloter que pour en prendre plein les mirettes. Sur les 26 kilomètres que comptent l’ascension du village d’Adrall au col del Cantó (1 730 m), je me suis arrêté 3 fois pour prendre des photos. C’est digne d’une épopée norvégienne. Mais quelle est donc cette terre rouge qui pointe sous la végétation ?
Sort, l’oubliée ; peut-être à juste titre
Si tu viens régulièrement par ici, tu sais que j’apprécie particulièrement les lieux que les touristes n’envahissent pas. Et bien sois assuré qu’à Sort, hormis quelques amateurs de sports d’eaux vives en saison, tu devrais te retrouver baignant parmi les autochtones. Qu’y faire après avoir ne pas avoir visité le chateau en ruine et l’église fermée ? Manger pardi ! Si le bar Pey, quoique cher, est validé par votre serviteur, il paraît qu’il faut s’attarder au cafè Pessets. Ah, cette manie de préparer ses visites après avoir été sur place.
N260 suite, le caillou devient monumental
Alors que la route s’accrochait aux montagnes jusqu’alors, voici maintenant qu’elle frôle, voire perce à travers les rocs et la caillasse flavescents. Mais où sont donc passés les 3 000 âmes censées vivre à la Pobla de Segur ?
Perves, village à chats
Même question à Perves. Tant qu’à réduire l’allure pour affronter la route que de trop rigoureux hivers ont forcé à se replier sur elle-même, autant s’arrêter au milieu de ce tas de pierres faisant office de village.
Humains ? Non.
Comité d’accueil ? Oui.
Deux chats se dorant la pilule au soleil. Puis trois. Puis quatre. Mais d’où sortent-ils tous, là ? Leur intérêt pour moi et ma voiture portent à croire que les humains sont rares dans ce coin reculé. Une recherche lors de la rédaction m’indique une population de… Deux habitants.
Photos floues de chats s’approchant trop de l’appareil ? Plein.
Comme d’habitude, l’église, seule attraction potentielle du village, est fermée. Je déguerpis avant que le peuple des chats ne me capture.
N260 encore, de la caillouteuse Catalogne à la moins tortueuse Aragón
Nouvel arrêt waouh – ou wow pour la startup nation – aux abords du réservoir d’Escales. Si tu as plus de temps, fais donc un crochet par le barrage au sud du lac ou une petite marche pour découvrir les ruines de l’abbaye de Lavaix. Au contraire de l’église d’el Pont de Suert quelques kilomètres plus loin, bien debout, toute aussi bétonnante et contemporaine que les barrages environnants. La N260 bifurque en Aragón juste après, où la route et quelques derniers village résument le spectacle de ces dernières dizaines de kilomètres. L’asphalte élargit ensuite son empreinte, adoucissant sa trajectoire au milieu de massifs plus lointains qui n’en restent pas moins impressionnants. Je commence à l’aimer cette route.
Aínsa, le caillou sur le caillou
Amateur.rice de rocaille médiévale, Aínsa, chef-lieu de la commune d’Aínsa-Sobrarbe, est pour toi. Sérieusement, tu as vu tous ces cailloux ? Le patelin entier est un empilement de pierres ! Les origines du village remontent au XIe siècle. Tout comme le château et l’église. Intéressante à plus d’un titre, cette dernière. Déjà, elle est ouverte. Consacrée en 1181, ancienne collégiale, elle assure un rôle religieux et militaire comme en témoignent les meurtrières de son clocher. Il faut dire que le lieu offre une vue imprenable sur les alentours, dont la chaîne montagneuse de l’Arbe. La contraction « sur Arbe », « sobre Arbe » en autochtone, deviendra le Sobrarbe de la commune. De part son style et sa grandeur, l’église Santa María d’Aínsa est un symbole de l’architecture romane de la région du Sobrarbe et de l’aragonais. Je n’ai pas très bien compris quand le cloître se visite mais il semble valoir le détour. À défaut, voici déjà la crypte.
Jaca, vivante et un peu chagasse
Nous voici directement à Jaca. Désireux de profiter de ma soirée dans un lieu plus vivant que le chapelet de bourgades traversées jusque là, j’ai continué de dérouler de nuit la facétieuse N260.
Jaca, c’est seulement 13 000 habitants, mais une belle animation, en particulier lors des fêtes de la nativité ; nous sommes ici un 23 décembre. Un chorale répète sa représentation dans la cathédrale San Pedro – tout aussi symbolique et encore plus importante que l’église d’Aínsa. La foule se presse autour des animations de rue. Et surtout, les innombrables bars à tapas sont blindés, y compris en terrasse. Prépare-toi à y jouer des coudes : aucun personnel ne viendra te donner une carte ou même te dire bonjour tant que tu n’iras pas leur forcer la main au comptoir ; déroutant. Par conséquent, aucune adresse conseillée. Sortir seul semble ne pas être dans les us et coutumes locaux vus les regards. Au moins je me coucherai tôt et profiterai de la faune squattant les abords de la citadelle. Ouais, il y a bien des biches et des cerfs en liberté en ville. Normal. Petit déjeuner cliché : ¡chocolate con churros!
À voir aux alentours : le monastère San Juan de la Peña.
Canfranc Estación, l’arnaque du siècle
Canfranc Estación, c’est le lieu que je voulais visiter depuis une bonne décennie. Les urbexeurs nous ont vendu cette gare désaffectée comme un gigantesque joyau perdu en pleine montagne. « Au milieu de nulle part » dit même un des sites. Les photos nous ont fait baver d’envie, mon vieil ami Vincent et moi.
Bon. Le site est bouclé. Ce n’est pas une surprise puisque la gare subit des travaux de rénovation depuis 2018. Ce qui n’est pas de nature à arrêter l’explorateur urbain en herbe que je suis. Mais là, je me suis laissé ramollir par les grilles et différents panneaux de mises en garde. Pourquoi ? PARCE QUE CETTE FOUTUE GARE EST EN PLEINE VILLE ET QUE CES URBEXEURS DE ROGNE NOUS ONT RACONTÉ DE LA MERDE EN BARRE. Entre les autres visiteurs déçus, les passants, la circulation, 10 à 20 personnes m’auraient vu escalader l’enceinte. Je n’ai pas envie de faire la connaissance de la guardia civil. Peine perdue.
Pour les amateurs prévoyants, le site se visite sur réservation. Sauf le lundi, jour de mon passage. Double fail.
Tout ça manquait de neige. Puisque c’est ça, je me casse au ski.
Super récit Didiche ! 😊
À quand la tournée nostalgie à Blagnac ? 🥳
Merci ! En voilà une bonne question 🙂
Toujours aussi belle tes photos
Merci Sophie, j’espère que tout le monde se porte bien !
Revu cette balade avec plaisir, points de vue incomparables
Vivement qu’on puisse à nouveau déambuler librement !