Allez, un titre putaclic. Ça t’intrigue ? Tant mieux. J’éclairerai ta lanterne plus bas. En attendant, voici donc une nouvelle escapade vieilles pierres aux alentours de Paris.
Commençons donc la visite par la dure et implacable réalité de 10 chiffres froids et précis.
2 : le nombre de châteaux sur le domaine. Et ouais !
7 : le nombre de moutons qu’on y a vus. Des moutons dans un jardin de château ? Le lieu est « éco-géré », le désherbage est donc manuel. Les moutons fournissent-ils leurs concours à cette tâche ?
11 : le siècle où l’histoire du domaine commence. À moins que ce ne soit le XIIe ? En fait on n’en sait rien. Paie ta précision en fait.
32 : le nombre de sources identifiées qui alimentent les plans d’eau.
40 : le nombre de ruches installées, mais que nous n’avons pas vues. Eco-gestion, tout ça.
99 : la durée en années du bail emphytéotique liant la Fondation Léopold Mayer pour le progrès de l’homme, propriétaire des lieux, avec la région Île-de-France, gestionnaire.
530 : la longueur en mètres du vertugadin. Avoue tu sais pas ce que c’est hein ?
800 : la surface, en hectares, du domaine. Diantre. Le parc en lui-même fait déjà 70 hectares. Fichtre.
1759 : l’année où les constructions sont achevées. Ça on en est sûr. Enfin.
400 000 : le prix en euros du changement des fenêtres du château du haut en 2012. L’histoire ne dit pas si cela a donné droit à un crédit d’impôts.
Pour information, un vertugadin est un terrain planté de gazon dont la pente met en valeur les plans étagés d’un édifice et / ou d’un jardin. Ça clabousse hein. Commençons donc la visite par le hameau de Villarceaux et les jardins, le château du haut aura son moment plus tard.
Allez, tu n’attends que ça, passons aux histoires de fesse ! Pour ce faire, laisse-moi te présenter deux… personnages.
Premier protagoniste : Louis de Mornay, accessoirement marquis de Villarceaux, et donc résident régulier des lieux dont il hérite. Militaire par obligation (ah, le poids des traditions familiales), ses conquêtes préférées sont plutôt féminines. On dit que ce sont les connaissances qui parlent le mieux d’une personne. Dont acte. Selon Claude-Henri de Rouvroy de Saint-Simon, c’est un « débauché luxurieux » faisant « beaucoup de fracas avec les femmes… ». Gédéon Tallemant des Réaux le décrit « chassant un gibier qui n’est ni de poil ni de plume… ». Un temps, il est emprisonné à la Bastille pour « avoir séduit une jeune pucelle ». À 24 ans, Louis le chaud lapin se marie à Denise de la Fontaine d’Esche, fille d’honneur de la reine Anne d’Autriche. Alors, posé le garçon ? Penses-tu. Je ne sais pas si c’est d’être avec une épouse bien plus âgée et friquée que lui qui ne le satisfait pas, mais il poursuit les aventures amoureu… romanti… physiques, quoi. Parmi ses conquêtes figure Madame de Maintenon, future épouse secrète de Louis XIV. La rumeur dit qu’elle s’est lâchée au domaine elle aussi, avant de mettre fin à sa relation de 3 ans avec le marquis pour préserver sa réputation. De cette époque reste un portrait peint par Mornay lui-même la représentant nue, toile aujourd’hui accrochée dans la salle à manger du château.
Deuxième protagoniste : Ninon de Lenclos. Comme il devait être agréable de passer du temps avec elle. Déjà, elle est prodige en tout : musique dès l’enfance au luth et au clavecin, elle enquille avec la littérature qu’elle connaît profusément avant de devenir femme de lettres adulte ; elle est aussi polyglotte, portée sur la science et athéiste affirmée. Quelques exemples de sa respectabilité ? Elle corrige la première version du Tartuffe à la demande de Molière lui-même, Louis XIV lui demande régulièrement son opinion. Puis, la talentueuse Ninon n’enquille pas que les savoirs. Elle hérite de la fibre libertine de son père, Walpole la surnommant « Notre Dame des Amours ». Elle s’amuse à classifier ses conquêtes : les « payeurs », les « martyrs » (soupirants sans espoir), les « caprices » (élus du moment), croquant parfois même quelques « bougres » (homosexuels), avec une préférence pour les hommes plus âgés. Voltaire romance d’ailleurs la première aventure de la jeune Ninon de Lenclos, pas encore majeure selon notre standards actuels, avec Richelieu, profitant là de sa dernière maîtresse. L’auteur raconte aussi que, alors que le marquis Louis de La Châtre avait exigé à la libertine un billet jurant fidélité pendant son absence, celle-ci s’écria en plein orgasme avec un autre : « Le beau billet qu’a La Châtre ! » Bien plus tard, pour ses 77 ans, elle s’offre une liaison avec l’abbé de Châteauneuf. Enfin, même après sa mort à 84 ans, elle continue d’être une bienfacteresse : elle lègue 2 000 livres tournois au jeune Voltaire (11 ans) qu’on vient de lui présenter, dans le but de financer ses études. À noter que d’après Vauban, un journalier gagne alors environ 300 livres par an. Bref, une sacrée personne.
Le rapport entre nos courtisants et notre domaine ? Mais si, le domaine de Villarceaux dont je parlais, là, avant que ça devienne intéressant. Et bien imagine la gueule des soirées quand nos deux courtisans Ninon et Louis ont été amants trois années durant, au domaine. « Résidence de plaisirs » qu’ils disent sur le site officiel. Ouais, on s’est compris hein !
Site officiel, page Wikipédia.
Merci à Emma-Jane pour la sortie, le précis d’histoire, et l’article illustré à consulter immédiatement.